FOUR BROTHERS/QUATRE FRÈRES
Le Malcolm X du cinéma

John Singleton se sent investit d’une mission : montrer toute l’étendue du racisme en Amérique. Il a eu ses hauts (Higher learning; Boyz n the hood) et ses bas (Shaft; Poetic justice) et ses « je viens d’une autre planète » (2 fast 2 furious). Contrairement à son compatriote Spike Lee, il démontre plus qu’il n’explique. Il est indéniable que le monsieur a du talent à revendre côté caméra, mais côté histoire, c’est pas du Nietzsche!! Il est direct, brute, peu subtil et prévisible. Mais le message, quoique manichéen, passe tout de même! Four brothers fait plus partie de sa première catégorie, c’est un petit peu plus recherché, léché (merci aux scénaristes David Elliot et Paul Lovett), mais toujours aussi direct et clair : une histoire de racisme sur fond de vengeance personnelle; une enquête « policière » menée par quatre frères pour retrouver le meurtrier de leur mère adoptive.

Détroit. Un soir d’hiver. Une vieille dame se fait tuer dans un braquage de dépanneur. Aux obsèques, réunion des quatre frères d’adoption qui veulent retrouver le meurtrier avant la police. Ce ne sont pas des enfants de cœur! Au fur et à mesure qu’avance l’enquête, des éléments compromettants surgissent. Et des hommes tombent! Mais tout rentrera dans l’ordre (grâce à la loi de la rue).

C’est avant tout une fiction campée dans une réalité drôlement viable. Alors, il est difficile de « backer » de tels gestes (lire violence) pour arriver à ces fins. Malheureusement, Singleton n’est pas dans le tord! Même si nous nous voilons les yeux, de tels crimes surviennent tous les jours. C’est pourquoi j’ai aimé Four bros. On ne passe pas par quatre chemins pour nous faire comprendre toute la gangrène qui ronge le système (américain ici!) « Sa propre justice », aidé par la vraie justice qui ferme les yeux (eux aussi!) Ce qu’il y a de bien dans le film, contrairement aux autres qu’il a réalisé, c’est que tout n’est pas noir, pas blanc. Il y a une parcelle de couleur grise intégrée, petite, mais visible. Ce ne sont pas tous les noirs les opprimés, ni tous les blancs les persécuteurs. C’est une question de classe sociale, de fraternité, d’enjeu politique. Et dans ce cas-ci, c’est bon d’être clair, car on n’a pas le temps (et le vouloir) de prendre des notes. Donc, l’info se limite à quelques noms sans plus! Bonne note!

Avant tout, Singleton, Elliot et Lovett ont compris que le public veut du vrai. Et le réalisateur nous en donne : une caméra à l’épaule fluide, des scènes courtes et colorées (une bonne dose d’humour vogue sur 4 bros., d’ailleurs!) et des comédiens potables. Il faut dire que leurs personnages sont à la limite d’être unidimensionnels et Whalberg, Gibson et Hedlund réussissent tant bien que mal à jouer le jeu de la « familia ». Andre Benjamin (alias Andre 3000), par contre, est surprenant de sobriété. C’est d’ailleurs lui qui a le meilleur rôle (père de famille; ancien syndicaliste; fils adopté; rêveur magouillé), autant de facettes qui étoffe un caractère. Et il le rend bien! Pour ce qui est des personnages secondaires, ben… sont secondaires, donc peu recherchés. Ceux-ci avancent donc dans l’intrigue à tâtons (comme nous) et découvrent des vérités plus difficiles à avaler. Ces vérités nous sont garrochés par l’intermédiaire de folles poursuites, de tapes sur la gueule, de phrases crues et de trou dans la glace (voyez le film, vous comprendrez!)

John Singleton a réussi à doser violence, humour, cascades, musique pour concocter son meilleur film à date. Encore peu subtil, mais quand même divertissant, avec LE message d’usage intégré. Un bémol sur l’utilisation du mélo, par l’entremise de la (feu-) mère, à travers les yeux des enfants (c’est têteux!) Mais comme je l’ai écrit, Singleton n’est pas subtil… Et les comédiens, pas des Denzel Washington… Tout de même à voir!! 3.5/5 par François Gauthier cinemascope@deltar.net