Critique de
A HISTORY OF
VIOLENCE/UNE HISTOIRE DE VIOLENCE
Thèse sur le comportement
Rares sont les cinéastes
qui peuvent se targuer de faire réagir autant le public
que la critique. Cronenberg, qu'on l'aime ou non, fait partie
de cette catégorie sélecte. Sa filmographie,
très hétéroclite à première
vue, a toujours comme point central l'Homme et son humanité.
A History of violence n'échappe pas à cette
loi.
Basé sur une
bande dessinée de John Wagner et Vince Locke, David
Cronenberg a dessiné (justement!), par les premières
images, la famille américaine type. Le ton et les traits
assez caricaturaux laissent présager, quand on connaît
le réalisateur, un dessein tordu pour eux plus tard.
Ce qui est évidemment le cas! Il déconstruit
petit à petit tous les stéréotypes maintes
fois dépeints au cinéma: le mâle dominant,
mais sage (qui cache un lourd secret); la femme aimante (qui
délaisse et ensuite, se parjure); le bon fils "à-la-graine-de-papa"
(qui se cérébralise pour mieux exploser). Seule
le bébé garde sa nature et son honnêteté,
rescapée du couperet cronenbergien, pour devenir la
voie/x du futur!
Nous découvrons
donc au début une gentille famille d'une ville paisible,
qui vivra un événement tragique par l'entremise
de l'arrivée de malfrats en cavale qui tentent de dévaliser
le resto familial. C'est sans compter sur le maître
de maison (Viggo Mortensen, post-Aragorn) qui sauve in extremis
sa clientèle en tuant de sang froid les deux bandits.
Devenu héros, l'homme se fait public et sa bouille
réveille des souvenirs du passé. Un mafieux
de Philadelphie (excellent Ed Harris) croit reconnaître
en l'homme un ancien ennemi et vient semer le doute dans le
clan Stall. La persistance de ceux-ci provoquera l'irréparable
et le passé ressurgira. Les points sur les "i"
étant maintenant mis, la confiance ne règne
plus et de vieux dossiers sont à régler pour
que le calme et la sérénité reviennent...
Les dernières séquences avec William Hurt en
grand frère du héros sont délectables,
tout comme les dernières images en famille, où
Cronenberg leur fait jouer l'hypocrisie. Une finale qu'on
pourrait dire ambigüe! Hé! Hé!
A History of violence
est le plus commercial de ses films en date (Merci à
Sharon Stone pour ses frasques sur Basic instinct 2 qui l'on
dégoûté au point de quitter la production)
Le cinéaste est resté intègre avec lui-même
et nous a offert une thèse sur l'Homme et ses mystifications,
ses principes "moraux", ses qualités et ses
jardins secrets. Cronenberg n'a jamais fait les choses à
moitié. C'est ce qui fait de son oeuvre quelque chose
d'organique, tangible, plus vrai! Rien n'est tout blanc, ni
tout noir. Il dépeint chaque zone grise de la pensée
humaine et l'amplifie jusqu'à un résultat à
la limite du supportable, mais toujours plausible. Il creuse
jusqu'aux limites de la "bête" pour en extraire
l'humain caché. Tout en ne dénigrant pas ses
années juvéniles où hémoglobine
et monstruosité avaient les devants de la scène.
Il réussit à mélanger avec tact (enfin,
presque!) gore et sobriété. A History of violence
est le film de David Cronenberg le plus achevé de sa
filmographie. Un délicieux buffet froid de la psychologie
humaine. À voir et revoir. 4.5/5 par François
Gauthier cinemascope@deltar.net