Critique de
LES POUPÉES RUSSES
Comme de vieilles pantoufles
C’est avec un
plaisir évident que l’on retrouve les personnages
de l’Auberge espagnole cinq ans plus tard. Comme lorsqu’on
cherche quoi mettre et que l’on fouille dans la garde-robe
pour tomber, par hasard, sur une paire de bonnes vieilles
gougounes qu’on avait oublié dans un coin. Les
remettre, c’est remettre des souvenirs! Voir où
sont rendus Xavier et ses potes, c’est se rappeler comment
nous les avons adorés. Une chance que Romain Duris
et les autres ont mis de la pression sur Klapisch pour remettre
leurs costumes, car celui-ci n’est pas enclin aux suites
(le pourquoi d’une si grande période d’attente)
Une fois convaincu, le réalisateur s’est exécuté
avec une facilité déconcertante (selon ses dires!)
pour écrire l’évolution de Xavier, le
personnage central.
Cinq années
ont passé depuis l’été à
Barcelone. Xavier vit de petits boulots et d’amourettes
en attendant de pouvoir publier son livre sur son expérience
en Espagne (qui dort dans un tiroir) Il ne sort plus avec
Martine (Audrey Tautou), mais sont toujours bons amis. Celle-ci
a un enfant de trois ans et enligne les conquêtes, sans
succès. Il est en appart avec Isabelle (Cécile
De France), la gentille lesbienne. Il croisera William (Kevin
Bishop), le frère concombre de Wendy (Kelly Reilly),
qui lui annonce son futur mariage avec une ballerine russe
(Evguenya Obraztsova). De plus, il lui apprend que sa sœur
vit aussi d’écriture à Londres. Un de
ses boulots lui obligeant à concocter un scénario
nanane pour un téléfilm en anglais, il ira la
retrouver en Angleterre pour un peu d’aide linguistique.
Ils se retrouveront tous à Saint-Petersbourg pour les
noces du frérot british. L’amour sera aussi au
rendez-vous!
Plus cérébral,
voilà le constat premier que je fais des Poupées
russes. Autant l’Auberge espagnole était enfantin
et viscéral, autant celui-ci est plus posé et
chargé d’émotions. Une crise d’identité
trentenaire pour Xavier. J’ai eu l’impression
bizarre que Klapisch faisait un post-Truffaut (il ne s’en
cache pas! « l’Homme qui aimait les femmes »),
une sorte de pablum philosophico-social, agrémenté
de questions existentielles sur l’Amour et les femmes.
Une gentille satire sur la génération X. Le
scénario du réalisateur est recherché,
intelligent et toujours saupoudré de cet humour caustique
qui a fait le charme du premier. Il est aussi très
bien rendu par la distribution originale, à commencer
par Duris. Pilier poids plume qui représente notre
sexe en cavale, le comédien semble avoir un plaisir
fou à jouer le jeune auteur en manque d’inspiration
et de claques sur le menton. Un jeune Pignon pour intellos!
Xavier est la pierre angulaire d’une génération
en manque de tout et de rien, tributaire de son passé!
Cédric K. a
aussi ce don pour montrer les petites choses et les rendre
attrayantes, surtout grâce à un montage vivant
et kaléidoscopique. Certaines scènes sont à
croquer, comme les menteries de Xavier (dansant au pipo!)
ou bien Martine en princesse des temps modernes racontant
ses déboires amoureux à son fils. Excellent
directeur d’acteurs, il sait aller chercher l’émotion
là où elle se cache.
Personnellement, j’ai
trouvé le film plus ciblé vers les 25-35, mais
évidemment, une grande majorité d’entre
nous ont déjà vécu ce genre d’aventures,
à plus ou moins grande échelle. J’ai aussi
aimé les pointes tirées vers les problèmes
plus globaux, comme la mondialisation. Déjà
le message passe clairement quand on met en scène huit
copains de pays différents, donc de cultures différentes.
Personne ne sera dépaysé
(si vous avez aimé l’Auberge…), car la
facture reste la même visuellement et musicalement.
Mais au lieu d’être chaud comme l’Espagne,
c’est humide comme l’Angleterre. Très agréable
retour sur les écrans. 4/5 par François Gauthier
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