Critique
de
MUNICH
Spielberg ne chie pas de m**de!!
Bon, maintenant que j'ai votre attention, mettons les choses au clair: Steven Spielberg n'a pas la grâce divine! Il s'est déjà fourvoyé, ou plutôt égaré, avec des films plus légers (Always; 1941; la dernière moitié de A.I.; War of the worlds, en tout cas...) Quand il décide de prendre son côté sérieux, généralement il le fait avec tact, justesse et franchise (soldat Ryan; Schindler; Couleur pourpre. Aies-je oublié Amistad? Honnêtement, oui!!) De plus, le golden boy sait s'entourer des meilleurs (Là, je ne donnerai pas d'exemples. Il a une carrière de plus de 30 ans, ça ferait une méchante liste de noms!!) Cette introduction nous amène à son dernier bébé: Munich qui, comme vous le savez, s'attarde aux malheureux événements des Jeux Olympiques de 1972 et ce qui s'en suivit. Spielberg, par l'entremise des scénaristes Kushner et Roth, a dépeint la réplique d'Israël face aux terroristes palestiniens responsables du massacre. Ils se sont basés sur un livre écrit en 1984 par George Jonas qui soulevait la thèse d'un complot international.
Munich est un film froid, calculateur, qui avance à pas de loup vers un cul-de-sac moral: la violence engrange la violence et nous sommes tous le pantin d'un autre. Ce qui fait la force du film se trouve dans le jeu des acteurs, à commencer par Eric Bana. Son personnage, Avner, agent du Mossad engagé incognito pour éliminer l'ennemi, apprend à ses dépens le poids de la justice. Bana joue admirablement la torture d'un être juste, fier, mais tiraillé par le doute d'une mission plus complexe qu'il n'y paraît. Il est entouré de Mathieu Kassovitz, Daniel Craig (futur J.Bond blond?!), Ciaran Hinds, Hanns Zischler, Geoffrey Rush (Barbarossa des Caraïbes...), tous plus excellents les uns que les autres. La force du réalisateur fut de montrer tous et chacun dans son plus simple appareil. C'est la direction des comédiens qui fait le noyau du film (et le scénario, bien entendu! Pas de scénario étoffé et informé, pas de film intelligent, que les acteurs soient bons ou non!)
Mais Spielberg étant ce qu'il est, on ne peut se passer de scènes d'action précédées d'une tension quasi-insoutenable. Car nous ne connaissons pas le sort des protagonistes. Ici, nous n'assistons pas à un pur produit hollywoodien. C'est l'Histoire, qu'Elle soit démentie ou non. D'ailleurs, quelques tours de passe-passe de son cru saupoudrent l'ensemble de Munich. La touche Spielberg, quoi! Ce que je reproche au réalisateur, c'est sa manie d'appuyer d'une morale et/ou d'amener, par des flashbacks parfois inutiles, le résultat final. Il sait prendre par la main le public et sait le conduire où bon lui semble, mais doit toujours donner une explication à des faits qui, généralement, parlent d'eux-mêmes. Dans le cas présent, Avner vit dans ses rêves les tragiques événements, mais à petites doses (pour le spectateur, s'entend!), pour nous amener à une apothéose que l'on soupçonnait un peu. Les deux lignes directrices (les événements au passé et la mission du Mossad) sont montées telles que le spectateur assiste au final à une explication rationnelle. Pourtant, tout le long du film, Spielberg se contente de montrer les choses plus qu'à les provoquer, ce qui est la vraie force de Munich. Il nous inclut dans l'équipe vengeresse comme voyeur. Son punch final démonte (un peu!) son concept de participation. Mais, comme je l'ai écrit plus haut, Steven étant ce qu'il est, il aime prendre par la main pour mieux nous dérouter à la fin. En soi, Munich est plus achevé qu'Amistad et A.I.!
Écrire que Munich était un mal nécessaire serait plutôt inapproprié. Des exemples me viennent de maux nécessaires: Elles étaient cinq; Woodsman; der Untergang... Des films tournés sans fioritures, sans "éclats". Munich a son côté sobre lorsqu'il aborde la psychologie des personnages. Le côté suspense/explosions gardera en éveil le spectateur moins friand de ce genre de drame. C'est la force ET la faiblesse de Steven Spielberg: savoir montrer à un large public ce qu'un réalisateur plus "underground" aurait admirablement détaillé. Reste que Munich est à classer dans ses meilleurs, tant le dosage psychologie/grandiloquence est réussi. C'est juste cette manie de finir ses films, ahhhh!!.... "On demande toujours la perfection à un être d'exception!" 4/5 par François Gauthier cinemascope@deltar.net